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En quelques mots,
La norme ISO 50001, publiée en 2011, a été refondue après un travail de concertation auprès d’experts d’une trentaine de pays. Comme toutes révisions des normes ISO, l’objectif est de maintenir sa cohérence avec les évolutions organisationnelles, politiques et économiques au niveau international.
La première grande refonte repose sur l’adoption de la structure commune à l’ensemble des normes de systèmes de management (comme l’ISO 9001) afin de faciliter son intégration par les entreprises déjà utilisatrices d’une de ces autres normes. Quant à l’ensemble des autres modifications, elles ont pour objectif la clarification de la démarche de performance pour mettre en valeur les risques, les parties intéressées et la performance énergétique, notamment en impliquant beaucoup plus la direction de l’entreprise à la démarche et en instaurant la mesure et le suivi de données énergétiques (comptage et facteurs influents) dès le démarrage de la démarche.
Cet article décrypte la nouvelle version pour apporter un éclairage pragmatique, notamment comment sont impactés les Systèmes d’Information des Energies (SIE), les moyens de collecte, de mesure, d’archivage et d’analyse des données énergétiques. Il est écrit en collaboration avec Marc Lacaze de la société ManageMAINT’Energie, cabinet conseil en performance de la maintenance et des Systèmes de Management de l’Energie.
Adoption de la structure HLS (High Level Structure).
La première grande évolution de l’ISO 50001 est l’adoption du format HLS (High Level Structure) qui est le cadre commun aux normes relatives aux systèmes de management. La structure HLS s’appuie notamment sur des chapitres clefs que l’on retrouve d’une norme à l’autre, ainsi que des concepts clefs communs aux normes permettant un même langage quels que soient le secteur et l’organisme. Cette harmonisation entre les normes améliore leur compréhension et leur application. L’adoption du HLS par la nouvelle version de l’ISO 50001 doit notamment faciliter son intégration pour les entreprises ayant déjà déployé par exemple les normes ISO 14001 ou ISO 9001.
La structure de la norme ISO 50001 selon le HLS.
Il est notable que les chapitres sont classés selon la roue de Deming d’amélioration continue, Plan – Do – Check – Act (planifier – faire – contrôler – agir).
Leur contenu peut être résumé ainsi :
INTRODUCTION, chapitres généraux introduisant la norme
Chapitre 1 : Domaine d’application
Chapitre 2 : Références normatives
Chapitre 2 : Termes et définitions
« PLAN »
Chapitre 4 : Contexte de l’organisme (nouveautés)
Chapitre 5 : Leadership
Chapitre 6 : Planification (nouveautés)
Chapitre 7 : Soutien
=> Procéder à la revue énergétique et définir :
- La consommation de référence ;
- Les indicateurs de performance énergétique IPÉ (ou KPI pour Key Performance Indicator) ;
- Les objectifs, les cibles et les plans d’actions nécessaires pour obtenir des résultats qui permettront d’améliorer la performance énergétique en cohérence avec la politique énergétique de l’organisme.
« DO »
Chapitre 8 : Fonctionnement
=> Déployer les plans d’actions de management de l’énergie.
« CHECK »
Chapitre 9 : Évaluation des performances (nouveautés)
=> Contrôler, surveiller et mesurer les processus et les caractéristiques essentielles des opérations qui déterminent la performance énergétique au regard de la politique et des objectifs énergétiques, et rendre compte des résultats.
« ACT »
Chapitre 10 : Amélioration
=> Mener à bien des actions pour améliorer en permanence la performance énergétique et le Système de Management des Energies (SME).
Quels sont les Changements liés à l'adoption de HLS ?
Les parties 1, 2 et 3 ne sont pas impactées. Ces chapitres sont d’ordre général relatif aux normes ISO reprenant le domaine d’intervention, la définition des termes et les références normatives. Si l’adoption de la structure HLS implique des changements de forme pour les autres chapitres, cette mise à niveau par rapport aux autres normes introduit également des changements organisationnels qui peuvent induire des changements d’exigences mettant en avant des points spécifiques.
Contexte de l’organisation (chapitre 4) – Facteurs pertinents, statiques, données contextuelles et parties intéressées.
Il s’agit ici de considérer avec finesse les facteurs influents affectant négativement ou positivement la performance énergétique (indicateurs) et le système de gestion de l’énergie de l’entreprise. La norme introduit la notion de facteur pertinent, soit une variable significative soumise à des variations courantes et influençant les consommations, autrement dit les conditions d’activités. Ce peut être les conditions météorologiques, conditions opérationnelles comme les quantités de matières ou de pièces produites, valeurs d’une pression, etc. Le texte distingue les facteurs statiques, qui sont des variables significatives qui ne varient pas comme la taille du personnel, les surfaces éclairées et chauffées, la conception d’un équipement, etc.
Les conditions d’activité et les données d’activité doivent être identifiées et suivies, ce qui implique de les mesurer et de les enregistrer. Il faut alors procéder aux ajustements (chapitres 3.4.8, 3.4.9 et 3.4.10), c’est-à-dire aux modifications des données afin de tenir compte des changements des facteurs pertinents pour permettre la comparaison de la performance énergétique dans des conditions équivalentes.
L’attention est également portée sur l’utilisation des données contextuelles propres à l’environnement de l’entreprise afin que l’entreprise identifie ses enjeux qui peuvent compromettre sa performance. Ce sera par exemple prendre en compte le risque de sécheresse d’une rivière dont l’eau est puisée pour alimenter un système de refroidissement,
Issue de la norme ISO 26 000 (portant sur la RSE), la prise en compte des parties intéressées, encore appelées parties prenantes, est demandée. Ainsi, si l’entreprise doit se questionner sur les enjeux influençant sa capacité à obtenir les résultats attendus, elle doit également déterminer les parties intéressées qui sont pertinentes pour la performance du SME : autant celles qui influencent (obligations réglementaires, contexte du marché de l’énergie, sous-traitance de maintenance, etc.) que celles qui sont influencées (fournisseurs d’équipements, techniciens de maintenance internes/externes, etc.).
Les risques (chapitre 6.1)
Le chapitre 6.1 exige de déterminer et, le cas échéant, de prendre des mesures pour remédier aux risques (impacts négatifs) et d’identifier les opportunités (impacts positifs) pouvant avoir une incidence sur la capacité du SME à produire les résultats escomptés. Les risques, internes comme externes, sont liés à l’environnement de l’entreprise, aux parties intéressées mais peuvent être également organisationnels. C’est une notion de risque macro, ils sont liés à la politique énergétique de l’entreprise et sont de natures très variées (par exemple un transformateur 20 kV hors service, une gestion de compétences techniques sur les cellules HT, l’utilisation d’un réseau de chaleur, etc.).
Ces nouvelles exigences permettent à l’organisation d’être en mesure de prévoir des scénarios et leurs conséquences. En identifiant ces éléments lors de la mise en place du SME, l’entreprise est en mesure d’anticiper les risques pour en atténuer les effets indésirables et de mieux profiter des opportunités et potentiels des circonstances favorables.
Ce processus est complémentaire au point 6.3 « Revue énergétique », qui est le bilan opérationnel détaillé du SME.
Les compétences (chapitre 7.2)
Afin de mener au mieux la démarche, il est demandé à l’entreprise de déterminer les compétences attendues pour les différents personnels ayant une incidence sur la performance énergétique. Le cas échéant, des actions de formation doivent être entreprises afin d’acquérir les compétences nécessaire aux fonctions dédiées à l’énergie. L’efficacité de ces formations doit être évaluée.
Communication (chapitres 7.4)
Dans cette version de la norme, la communication externe n’est plus optionnelle, même si l’entreprise peut choisir ses sujets et sa méthode. Le Système d’Information des Energies, pendant digital du SME, devra intégrer des moyens de communiquer autour des indicateurs de performance auprès des parties intéressées, mais aussi des personnels. Autrement dit, il faudra profiter des données (collectées et calculées comme les KPI) disponibles dans le système, pour les afficher ou les transmettre automatiquement aux intéressés (sous forme d’écrans et de rapports).
Planification et maîtrise opérationnelles (chapitre 8.1)
Sur ces points de la partie « Do » les exigences sont plus complètes ; la version 2018 renforce la notion de maîtrise des processus associés aux Usages Énergétiques Significatifs (voir exemple simplifié d’un processus ci-dessous) qui sont les postes ou parts importants de la consommation énergétique.
Sont attendus :
- Le contrôle des modifications et l’analyse des conséquences inattendues ;
- Le contrôle des usages énergétiques significatifs ou des processus liés aux UES ;
- La mise en place de la traçabilité et de la conservation des informations documentées afin d’avoir la certitude que les processus ont été réalisés comme prévu.
Surveillance, mesure, analyse et évaluation de la performance énergétique et du SME (chapitre 9.1)
La version 2018 de la norme est plus exigeante sur :
- Le « Quoi » ; ce qu’il est nécessaire de surveiller et de mesurer dont les indicateurs de la performance énergétique, les usages énergétiques significatifs et les consommations réelles par rapport aux consommations attendues ;
- Le « Comment » ; la méthodologie de contrôle du SME sur les points stratégiques que sont la surveillance, la mesure, l’analyse et l’évaluation pour en assurer la validité. La méthodologie doit inclure les éléments à surveiller, la périodicité de la surveillance et des mesures à effectuer ainsi que celle de l’interprétation de ces mêmes mesures ;
- Les résultats des évaluations, issus à la fois des enquêtes et des réponses apportées après des écarts de performance énergétique. La norme est plus précise sur l’analyse des causes des écarts de la performance énergétique. Elle oblige à y apporter une réponse ;
- L’entreprise doit conserver les informations pertinentes sur l’enquête et les actions correctives menées.
Si la norme n’indique pas les moyens à mettre en œuvre, il apparaît évident que ces nouvelles exigences implique de considérer la mise en place d’un Système d’Information des Energies capables de collecter, archiver et traiter toutes les données mesurées.
Quels sont les Changements spécifiques à la gestion de l'énergie ?
Politique énergétique (chapitre 4)
La norme précise qu’aucun type d’énergie ne doit être exclu dans la prise en compte du SME. Ce qui implique de considérer les classiques comme l’électricité, le gaz, l’eau, le fioul, etc. mais aussi les courants forts, le réseau de chaleur, etc. (chapitre 4.3).L’ensemble du réseau des énergies doit être considéré. Cette partie reprend également les exigences d’impact pour les enjeux (internes et externes) influant sa capacité à être conforme aux objectifs de performance (4.1) et les exigences pertinentes pour les parties intéressées (4.2).
Revue énergétique (chapitre 6.3)
Lors de la revue énergétique, il est demandé d’estimer les consommations et les usages énergétiques futurs. La revue énergétique permet d’identifier les usages énergétiques significatifs et d’y apporter les opportunités d’amélioration favorisant la performance énergétique.
Indicateurs de performance énergétique (chapitre 6.4)
Les indicateurs de performance énergétique déterminés doivent permettre à l’entreprise de démontrer l’amélioration de la performance énergétique. Lorsque l’organisation dispose de données indiquant que les facteurs pertinents affectent de manière significative la performance énergétique, l’organisation doit prendre en compte ces données pour établir le ou les IPE appropriés.
De plus les valeurs des IPE doivent être revues et comparées à la situation de référence respective. Toutes ces exigences sont nouvelles dans cette version de la norme et implique donc la collecte et l’archivage de ces données.
Planification de collecte de données énergétiques (chapitre 6.6)
Ce terme remplace le «plan de mesure de l’énergie» de l’édition 2011. La version 2018 introduit des changements importants dans la mesure de la performance.
En premier lieu, il est explicitement indiqué que« le plan doit préciser les données nécessaires pour surveiller les caractéristiques clés, et indiquer comment et à quelles fréquences les données doivent être collectées et conservées ».Ensuite, il est demandé de délimiter précisément le périmètre des données collectées et ce qu’elles doivent comprendre (points « a » à « e » du chapitre) :
- Les facteurs pertinents liés aux UES (Usages Energétiques Significatifs) ;
- La consommation d’énergie associe aux UES et à l’organisation ;
- Les critères opérationnels que sont les besoins et contraintes du process de fabrication associés aux UES ;
- Les facteurs statiques, le cas échéant ;
- Les données spécifiées (collectées par les systèmes de mesure et comptage) dans les plans d’action.
A retenir.
L’ISO 50001 : 2018 adopte la structure HLS, basée sur le PDCA de l’amélioration continue. Cette deuxième version de la norme renforce l’obligation de démontrer l’amélioration continue de la performance.
Elle impose de considérer le contexte au sens large : enjeux, risques et opportunités pour chaque domaine d’application, prise en compte des interlocuteurs internes et externes (parties intéressées) et données contextuelles. Cela implique d’organiser scrupuleusement la collecte et l’analyse des données, consommations et facteurs influents, mais aussi de renforcer la communication externe. Enfin, la révision de la norme systématise l’ajustement de la situation énergétique de référence et des indicateurs de performance avec les facteurs influents.
Le Système d’Information des Energies devra permettre la collecte, l’enregistrement, le traitement d’un grand nombre de données, et pas uniquement des consommations. Il sera intéressant que les analyses qu’il propose accompagnent la revue énergétique et permettent le suivi des différents indicateurs avec la situation énergétique de référence et les objectifs.
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