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Que signifie maintenance 4.0 ?
Si l’industrie 4.0 embarque son lot de démarches marketing pour positionner telle ou telle évolution technologique, il reste entendu que la recherche de compétitivité des industriels passe, de façon pratique, par une digitalisation des processus métier. La maintenance, longtemps vue comme un centre de coût, est reconnue désormais comme une pierre angulaire de cette compétitivité et a donc besoin de se moderniser.
On entend beaucoup parler de Data Science, Big Data, IIoT, Intelligence Artificielle et de réalité augmentée comme figures de proue d’une maintenance de l’industrie du futur, appelée maintenance intelligente (smart maintenance) ou maintenance connectée, ou encore maintenance 4.0. Quelle que soit l’appellation, l’élément clé et déterminant pour une mise en œuvre efficace de ces technologies est de disposer de données, autant celles venant de l’atelier (supervision, automatismes) que celles venant des systèmes de gestion de l’entreprise (ERP, GPAO, GMAO, …). C’est ce en quoi la maintenance se connecte.
Cet article se propose de passer en revue les piliers nécessaires à la connexion de la maintenance et de montrer au travers d’exemples qu’il existe déjà des démarches et des outils pour digitaliser la fonction maintenance accessibles aux entreprises entreprenant la démarche et sans casser nécessairement l’existant.
La mutualisation des données.
La digitalisation n’est pas un but, mais un moyen de répondre aux exigences de la compétitivité. Les entreprises ont besoin d’améliorer leur productivité et leur niveau de qualité, mais aussi leur réactivité et leur agilité. Pour cela, elles doivent changer leur organisation, leurs pratiques, leur management, organiser la collaboration entre les métiers afin de partager et enrichir les informations, c’est-à-dire se décloisonner. Les outils numériques, les nouvelles technologies en sont les moyens.
L’organisation des Systèmes d’Information des différents métiers de l’entreprise doit accompagner ce décloisonnement de l’entreprise.
Le décloisonnement des Systèmes d’Information permet la mutualisation des données, gage de l’amélioration de l’opérationnel et des prises de décision et profite à la maintenance. En effet, décloisonner les Systèmes d’Information permet la circulation des données entre les systèmes, c’est-à-dire le partage des données entre les acteurs concernés (maintenance, production, qualité, achat, direction, …). Cette mise à disposition d’une donnée issue d’un système dans un autre système offre aussi l’avantage de contextualiser la donnée, c’est à dire de croiser une donnée avec une autre sur laquelle elle exerce une influence. La contextualisation des données crée une information pertinente afin de mieux agir en temps réel ou de décider à posteriori d’amélioration. Plus on décloisonne les Systèmes d’Information, plus on consolide cet échange de données sur l’ensemble des systèmes et plus on augmente la pertinence des informations produites.
Par exemple, on peut croiser la fréquence d’apparition d’un défaut (donnée de la GMAO) avec les sources d’une matière première (donnée de l’ERP) afin d’identifier des différences entre fournisseurs et d’affiner ses exigences. Suivre une température c’est pouvoir détecter un dépassement de température (donnée d’une supervision) qui peut être croisé avec une production (donnée de l’ERP) afin d’associer ce dépassement de seuil à un lot de production, mais c’est aussi être informé de l’état de santé de l’équipement.
Les piliers de la maintenance 4.0.
Temps réel et contextualisation des informations sont essentiels pour l’efficacité de la maintenance. Le premier pilier regroupe l’ensemble des moyens permettant la circulation des données entre les systèmes. A cette fin, il faut :
- Une collecte automatique sur les équipements (via les automatismes et des systèmes communicants),
- Une diffusion automatique des informations et donc pour cela un réseau qui permet d’interconnecter les systèmes communicants,
- Une mise à disposition des données entre les systèmes, pour cela il faut des protocoles et des technologies d’échange de données standardisés.
L’interconnexion des logiciels métier sur des réseaux variés (réseaux industriels, réseau de l’entreprise, Internet) implique la collaboration entre l’IT et l’informatique industrielle, deuxième pilier, parce que les habitudes de travail et les enjeux ne sont pas les mêmes pour les automatismes et les systèmes de gestion de l’entreprise (voir notre série d’articles sur le sujet).
Un pilier essentiel de la maintenance 4.0 et plus généralement de la digitalisation de l’entreprise est la mise en œuvre d’une organisation décloisonnée où les pratiques des différents métiers sont pensées en cohérence les unes des autres. Les outils seuls ne suffisent pas. Interconnecter des logiciels est essentiel, mais faut-il que des règles de fonctionnement existent entre les services afin d’exploiter le partage des données.
Par exemple, interconnecter la GMAO et l’outil de planification ou d’ordonnancement organise la remontée de la planification d’une opération de maintenance dans la planification de la production afin de permettre un travail concerté entre la production et la maintenance. Reste à avoir défini en amont les modes opératoires des prises de décision. Dans cette même logique, on décidera par exemple de règles de nommage communes des pièces détachées entre les achats et la maintenance afin que la codification soit la même entre la GMAO, où l’on gère les stocks, et l’ERP où l’on commande les pièces.
Application à la maintenance préventive, exemple.
La maintenance préventive bénéficie largement de l’interconnexion des systèmes. Ainsi, il est possible de remonter dans la GMAO depuis la supervision ou des automatismes des valeurs de températures, pressions, mesures de vibration ou encore des index de compteurs de temps. Par simple paramétrage de la GMAO, des Bons de Travail (BT) peuvent alors être générés automatiquement soit sur dépassement du temps de fonctionnement de l’équipement, soit de manière conditionnelle sur le dépassement d’un seuil d’une valeur analogique.
Les interventions préventives sont ainsi réalisées de manière optimisée au plus près de la réalité de fonctionnement des installations plutôt que d’être traitées de manière systématique suivant une période. Un autre avantage est que les déclenchements des interventions et leur réalisation sont tracés et facilitent un travail d’analyse objective.
Application à la maintenance corrective, exemple.
Pour faciliter la maintenance corrective, on peut interconnecter encore une fois les supervisions et la GMAO : un défaut détecté par les automatismes est remonté du SCADA dans la GMAO. Une Demande d’Intervention (DI) est alors générée en automatique sans intervention de la production ni perte de temps. La DI est transformée en Bon de Travail par le dispatcheur du service maintenance selon les urgences. Il peut y avoir aussi la génération d’un appel, d’un email, d’un SMS via un système de gestion d’alerte et d’astreinte, lui-même connecté aux supervisions, permettant une plus grande réactivité pour les équipements les plus critiques.
On gagne en réactivité et productivité dans les actions de maintenance corrective, mais aussi en traçabilité des pannes et des réparations, permettant un travail d’analyse à postériori pour adapter la stratégie de maintenance de tel ou tel équipement.
Mise en œuvre d’une démarche TPM et maintenance prédictive, exemple.
Les temps de marche, collectés via les automatismes, peuvent être enregistrés dans un outil de suivi de performance machines (comme une plateforme TPM) qui les catégorisera. Ainsi, les informations telles que les pannes mécaniques, les bourrages matières, etc. intéresseront la maintenance pour adapter sa stratégie de réglages et d’entretiens tandis que les informations sur des problèmes de flux et d’organisation seront utiles à la production pour améliorer son organisation.
On peut envisager que les analyses automatiques de la plateforme TPM, remontées dans la GMAO, déclenchent des opérations de maintenance sur détection de dépassement d’une occurrence de défaut, par exemple. On rentre alors dans une démarche de maintenance prédictive, aussi appelée maintenance prévisionnelle, au sens où elle permet de prévoir les pannes.
Application à la synergie entre la maintenance et l’efficacité énergétique, exemple.
Afin de garantir la disponibilité de l’outil de production, la maintenance réalise des actions de réparation, contrôle, mesure et réglage. Ces actions impactent le fonctionnement énergétique des équipements de production. Les opérations de maintenance sont donc à la fois au centre de la performance machine et au centre de la performance énergétique, que le responsable maintenance cumule ou pas la responsabilité des énergies.
La GMAO permet le pilotage des opérations de maintenance tandis que la Système d’Information des Energies (SIE) permet le pilotage de la démarche d’efficacité énergétique. La mutualisation des données permet de nourrir aussi bien la GMAO que le SIE ; les valeurs de compteurs d’énergie, compteurs de temps, de pièces, les grandeurs analogiques, les alarmes sont utiles autant à la maintenance qu’à la performance énergétique.
Par ailleurs, des informations échangées entre le SIE et la GMAO facilitent le travail de la maintenance. En effet, l’état de consommation peut parfois donner des informations sur l’état de santé des équipements : par exemple une dérive du ratio consommation / quantité produite qui n’est pas liée à une cause opérationnelle peut être un signe d’usure ou d’encrassement et être alors source de déclenchement de maintenance.
A retenir.
Dans une démarche d’Industrie 4.0, la maintenance doit aussi se digitaliser pour devenir Maintenance 4.0. La mutualisation de la donnée au travers de l’interconnexion des Systèmes d’Information est la base d’une maintenance connectée. Il est essentiel de débuter sa digitalisation par la connexion de ses automatismes et de ses logiciels métier (GMAO, plateforme TPM, ERP, …) afin d’améliorer la conduite de ses opérations de maintenance, corrective et préventive et de disposer de données contextualisées permettant des analyses afin de modifier sa stratégie de maintenance.
Cette base solide de collecte et de mutualisation des données permettra ensuite la mise en œuvre de systèmes de plus en plus avancés.
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